Question storming
J’ai découvert l’atelier question storming il y a plus d’un an. A la lecture de Change your questions, change your life. Ce livre m’a vraiment marqué. Il parle des questions que l’on doit se poser pour mieux analyser une situation. Pour passer d’un premier état, souvent dans le jugement à un état de curiosité, pour se donner les chances d’apprendre, d’éviter de passer à côté des vrais problèmes. A la fin du livre, l’auteure parle de l’approche “Q storming” (Q pour question), qui permet une vraie rupture dans une analyse : “a method for discovering those questions to make breakthrough differences in decision-making, problem-solving, strategic planning, innovation, operational excellence, and culture.”J’ai proposé un Question storming comme exercice lors d’une rétrospective que j’ai facilitée hier. De nouveau j’ai été épatée par les résultats obtenus. Voici la façon dont je l’ai déroulé.
Dans quelle mesure un question storming pouvait nous aider ?
Il s’agit d’une équipe jeune. Il sont 8. Ils ne se connaissent pas bien. L’un d’entre eux vient d’arriver. Deux autres sont en préavis de départ.Ils découvrent Kanban. Les rôles et responsabilités de chacun ne sont pas encore clairs. Le fonctionnement avec les équipes environnantes non plus. Après un happiness radar je vois qu’il y a des choses qui marchent bien. Globalement l’entente entre les membres. Mais les processus c’est moins ça. C’est leur deuxième rétrospective. La première avait été un peu chaotique (manque de temps, manque de participants…)
Pour les avoir observés et écoutés avant la cérémonie, je vois bien qu’il y aurait plusieurs choses à améliorer. Oui mais par quoi commencer ? Qu’est-ce qui est le plus urgent ? De quoi ont-ils besoin maintenant ? Qu’est-ce qui va leur apporter une bouffée d’air parmis toutes leurs problématiques ?
J’ai pensé au Q storming parce que c’est un bon outil pour cibler l’aiguille dans la botte de foin. Pour regarder une situation d’équipe avec un peu de distance. Et s’emparer de ce qui fait que tout coince.
Le déroulement de l’atelier
Après les premières étapes classiques d’une rétrospective : check-in, revue des axes d’amélioration, revue des métriques, je présente l’atelier.
Puis je leur dis de penser à trois choses qui les gênent aujourd’hui. Personnellement. Je leur explique que je vais leur demander de me citer toutes les questions qu’ils se posent actuellement, auxquelles ils aimeraient une réponse. Une contrainte : ne parler qu’à la première personne. Donc en utilisant seulement le JE, le NOUS.
Je leurs donne un exemple : “comment est-ce que l’on peut donner de la visibilité sur notre production ?”Je note la consigne et ma première question au tableau.Je leur dis que c’est à leur tour.
Les questions arrivent doucement (pour me laisser le temps de les écrire), puis fusent. Naturellement certaines questions ne respectent pas la consigne (exemple : "Que font Julie, Thomas et Claire ? Quels sont leurs rôles ?" ) Donc je leur demande de la reformuler avec le JE, NOUS (exemple : "Comment est-ce que je pourrais mieux comprendre les rôles de Julie, Thomas et Claire ?")
La consigne est un élément clef. Cela force les gens à ne pas être dans le jugement des autres mais plutôt dans le questionnement de soi, de l’équipe. Cela oriente le débat sur des actions que nous pouvons mener nous plutôt que des actions que l’on attendrait des autres. Souvent quand je force à la reformulation, nous nous en amusons. L’équipe aide l’auteur de la question à la reformuler. C’est presque un jeu.
Je m’assure que tout le monde s’exprime en demandant simplement : “Marc : quelles questions te poses-tu actuellement ?”
Une fois que l’on en a collecté une bonne quinzaine, je m’arrête. Et je leur demande de venir voter pour la ou les questions qui les interpelle le plus. Celles dont on va discuter. Ils ont trois bâtons et viennent les placer au tableau. A cette étape on découvre ce qui préoccupe vraiment l’équipe. Les participants ne votent pas forcément pour les questions qu’ils ont posé eux-mêmes. Bien au contraire.
La suite de l’atelier est très simple. On discute des questions qui ont obtenu le plus de votes. Je leur demande de m’en parler un peu plus. Après il s’agit de faciliter les débats pour clarifier ce dont on aurait besoin, identifier un axe d’amélioration atteignable, une action réalisable à court terme.
Question storming, plus puissant qu’un simple brainstorming
Marilee Adams explique bien que le question storming est souvent bien plus puissant qu’un simple brainstorming. Ce qui est intéressant c’est le chemin de réflexion sur lequel l’approche mène les participants. C’est tout le sujet du bouquin qui explique la bascule entre le chemin du “judger” vers le chemin du “learner”. La richesse des discussions qui en découlent. Cela fait parler des gens qui à la base n’étaient pas très enclins à le faire.
Je crois que Marilee Adams propose d'autres astuces pour mener l’atelier qu’elle ne développe pas dans son bouquin. A creuser.
En faisant quelques recherches je suis tombée sur cette vidéo de Hal Gregersen. Il parle de ce don que les enfants ont de poser mille questions. Et que l’on perd adulte. Des 3 secondes à attendre entre une question et sa réponse pour avoir une réponse de meilleure qualité.
N’hésitez pas à me faire vos feedback sur l’exercice.